Euro : Sarkozy réinvente la souveraineté limitée....

Publié le par tutti 49

Euro: Sarkozy réinvente la souveraineté limitée 

Hier soir le président de la République a livré quelques considérations sur les rapports entre la démocratie, les peuples et l’Europe. Un mode de pensée qui rappelle, de loin, ce que Leonid Brejnev disait des relations entre l’URSS et les pays satellites.
(Capture d'écran Dailymotion - elysee - cc)
(Capture d'écran Dailymotion - elysee - cc)
Il y a quelque chose d’étrange au G20 : l’impression de vivre un mauvais film, tant le décor du palais des festivals, à Cannes, évoque le cinéma. Et lorsque Nicolas Sarkozy et Angela Merkel montent ensemble sur l’estrade de la grande salle où l’on a l’habitude, chaque printemps, d’assister à la remise de la palme d’or, on se dit que de leurs pupitres, la lauréate du meilleur rôle féminin et le lauréat du meilleur premier rôle masculin vont décerner le prix du plus mauvais scénario à un auteur grec, nommé George Papandréou.

Mais rien de cela ne se passe. Angela et Nicolas sont crispés. Leur parole à l’égard des Grecs appelés à se prononcer par référendum est pleine de dépit. « Le principe de l’appel au peuple est toujours légitime », admet Nicolas Sarkozy du bout des lèvres, avant d’ajouter « mais la question doit être celle de l’avenir européen de la Grèce » et vient vite la menace : « Pas un centime ne sera versé » tant que l’hypothèque politique ne sera pas levée, et l’accord du 27 octobre entièrement accepté par la Grèce.
On peut comprendre une partie de la position commune franco-allemande : les deux pays engagent les finances publiques dans cette histoire, et donc sont responsables de ces deniers devant leurs citoyens. Et nul ne doute que les sondages d’opinion leur donneront raison, du moins sur ce point.

Mais Nicolas Sarkozy a aussi précisé sa conception des relations politiques entre les pays de la zone euro, et en fait de l’Union européenne en général. Son analyse, commune avec Merkel, est qu’à la différence des autres pays en difficulté, il n’existe pas de consensus gauche-droite. La droite de la Nouvelle Démocratie ayant refusé toutes les augmentations d’impôts et les appels à l’union nationale du gouvernement socialiste.

« Avec l’Irlande, le programme européen a fonctionné parce que majorité et opposition étaient d’accord sur les grandes lignes du programme. Au Portugal, en Espagne, c’est la même chose », explique-t-il. Autrement dit, dans ces trois pays, l’alternance ne change pas grand-chose, la politique d’austérité s’applique, avec de simples variantes de style. Et ce n’est pas un hasard, mais une obligation : « l’Europe ne peut être efficace que si la classe politique est d’accord pour appliquer le programme européen. C’est ça la démocratie ! »

Et le président français de récuser, de fait, le principe de la consultation populaire : « il faudrait un référendum à chaque décision ? », répond-il à une question de Jean Quatremer sur le rapport entre la démocratie et les décideurs politiques européens.

Ce faisant, au nom de « la solidarité » et des « principes de bonne gestion », Nicolas Sarkozy vient de retrouver une conception politique, celle que Leonid Brejnev, secrétaire général du Parti communiste de l’Union soviétique avait défini vis-à-vis des pays satellites, notamment la Tchécoslovaquie en 1968 : ces pays avaient le droit de tout faire sauf de ne pas être socialistes. Et leurs dirigeants n’avaient qu’une politique possible : celle qui confortait leur appartenance au Comecon et au pacte de Varsovie, l’alliance économique et l’alliance militaire forgée autour de l’URSS.

Et comme Brejnev en son temps, Sarkozy et Merkel affirment qu’il n’ya pas d’autres voie pour les membres de la zone euro que celle qu’ils ont défini depuis le début : l’austérité, la récession, les politiques conservatrices et libérales, ce qui renforce l’idée, fausse à mon avis, que l’euro ne peut pas servir à autre chose.

Il y a néanmoins une différence, notons-le : l’URSS avait envoyé les chars à Budapest en 1956 et à Prague en 1968 pour empêcher la Hongrie et la Tchécoslovaquie de recouvrir leur souveraineté nationale. En 2011, les Grecs ont toujours un droit de sortie : s’ils votent non, ils pourront quitter l’euro, voire l’Europe, dans des difficultés économiques terribles. Nous n’enverrons pas les paras français sur l’Acropole ! C’est déjà ça.

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