Ces vrais sujets que l'affaire DSK a évacués.....

Publié le par tutti 49

Ces vrais sujets que l’affaire DSK a évacués de l'actualité

Marie-Lys Lubrano et Hervé Nathan - Marianne | Samedi 9 Juillet 2011 à 05:01 Marianne2.fr a décidé de revisiter huit actualités éclipsés par le tsunami médiatique qu'a été l'affaire DSK.



Depuis le 14 mai, la France entière est suspendue à  l’affaire Dominique Strauss-Kahn. De stupéfaction en révélations et supputations, le feuilleton occupe médias et politiques, occultant les débats que les électeurs auront à trancher dans moins de dix mois. Marianne a donc recherché, dans l’actualité de ces deux derniers mois, ce qui aurait mérité d’être porté à votre attention. Voici les débats dont vous avez été privés. Pourquoi ? Certains accuseront les médias d'en faire des tonnes sur l'affaire DSK. De leur côté, les responsables de journaux se disent« DSK fait vendre, alors il faut en parler ». Bon. Mais pourquoi DSK fait vendre ? Parce qu’il est un personnage politique important, longtemps pressenti pour faire la course en tête dans les primaires socialistes et que ces primaires décideront de l’identité du principal challenger de Nicolas Sarkozy lors de la présidentielle. Sauf que… Quand les déboires d’un ex futur candidat font passer à  la trappe les débats liés à la présidentielle, on se dit qu’il est temps de faire le point sur les grandes questions, auxquelles les partis se sont dispensés de répondre « grâce » à cette actualité.

Nucléaire, les autres sortent. Et nous, on fait quoi (à part virer Lauvergeon) ?
Qui s’est rendu compte en France que le sujet d’actualité le plus brûlant devrait être le nucléaire civil ? Entre le 14 mai et le 7 juillet, les annonces se sont multipliées. Le 24 mai, le groupe industriel le plus puissant en Europe - le groupe Siemens - annonce qu’il stoppe ses activités dans ce secteur. Le 26, la Suisse décide d’arrêter ses réacteurs d’ici à 2034; le 29 c’est le tour de l’Allemagne (d’ici à 2022), le 8 juin, le premier ministre japonais admet que son gouvernement a minimisé l’ampleur du désastre de Fukushima Daïchi….
Et le 4 juillet, l’Autorité de sûreté nucléaire donne un avis favorable à la poursuite de l’exploitation du réacteur numéro 1 à Fessenheim. On aurait pu s’attendre à une véritable polémique sur la question dans un pays qui tire 75% de sa production électrique de l’atome, et dont l’opinion publique, selon un sondage paru le 5 juin dans le JDD, est désormais favorable à plus de 70% à l’arrêt des centrales. Ce débat est d’autant plus indispensable que chaque famille politique est divisée. Au PS, Martine Aubry est pour la sortie, Hollande contre. Au Front de gauche, les communistes sont contre, mais le Parti de gauche et Jean-Luc Melanchon (le candidat commun) sont pour. A droite, les UMP historiques soutiennent le nucléaire, mais NKM préconise une réduction considérable de la part du nucléaire (comme Hollande)….  Pendant ce mois et demi de confusion, le seul acte du gouvernement fut, le 17 juin, de virer Anne Lauvergeon de la direction d’Areva. La seule française à sortir du nucléaire. Un peu court, non ?

Afghanistan, alors, stop ou encore ?
Ces vrais sujets que l’affaire DSK a évacués de l'actualité
La France a perdu deux militaires en Afghanistan. Le 18 juin tombait en effet au combat le soldat Florian Morillon, du 1er régiment de chasseurs parachutistes, puis le 25 juin, ce fut le tour du caporal Cyrille Hugodot, du même régiment. Ce qui porte à 63 hommes le nombre de morts depuis le début de l’intervention française dans ce pays. Leur décès n’a provoqué aucun débat dans les partis politiques sur la nécessité, et le but,  de l’intervention française en Afghanistan, surtout après la mort de Ben Laden. La récupération des deux journalistes otages, le 29 juin, hors un soulagement bien légitime, ne donne pas non plus lieu à une réflexion. En l’occurrence, c’est l’Amérique qui commande le débat français. Car c’est bien le président Barack Obama qui donne le signal du repli le 23 juin, avec l’annonce du retour dans l’année de 33 000 soldats. L’Elysée emboite le pas : un quart des soldats français rentreront ainsi chez eux d’ici Noël. Personne, ni à gauche ni à droite, ne pose la question suivante : pourquoi pas les autres?

Vacciner, c’est bon pour la santé !
Le 25 mai, la peste bovine, qui ravageait traditionnellement les troupeaux, en particulier en Afrique, a été officiellement déclarée éradiquée. C’est la deuxième maladie au monde, après la variole, dont l’action humaine a eu raison au niveau planétaire. Une vraie victoire de la science. A contrario, il semble que la vaccination contre certains fléaux piétine, voire régresse, comme pour la rougeole - une maladie pourtant mortelle. La faute semble-t-il à l’échec de l’opération H1N1 en 2009. La vaccination n’a plus bonne réputation et certains l’évitent. On n’a pas entendu la ministre de la Santé, ni les habitués relancer le débat sur ce point. Il est vrai que le « ténor médical » du PS, Jean-Marie Le Guen, a été fortement sollicité en tant que très proche de DSK…

La dette, la Grèce, le Portugal, la France, et alors ?
Ces vrais sujets que l’affaire DSK a évacués de l'actualité
Incroyable, mais vrai, la question grecque a disparu des radars français, à l’inverse du reste de l’Europe où la crise des dettes publiques fait la une des médias, de Berlin à Lisbonne, en passant par Rome ou Madrid. Le plus drôle est que la dernière initiative positive en faveur de la Grèce vient d’une banque française, BNP-Paribas, qui, sous l'impulsion de l’Elysée, a proposé une solution technique permettant de faire contribuer (un peu) les banques créancières de l’Etat grec au plan de  soutien européen.
En France, hors les journaux économiques, et les rubriques spécialisées, pas ou peu de commentaires. Comme si sans DSK au FMI, les journalistes français avaient décidé que l’économie décidément ne valait pas tripette. Pourtant l’enjeu est énorme, et européen. Didier Reynders, Premier ministre belge, propose le 29 mai d’européaniser la dette grecque. Pas de reprise. Le 5 juin, dans un Portugal asphyxié par les banques qui refusent de lui prêter le moindre euro, la droite gagne les élections, en campagne pour une « rigueur renforcée ». Pas plus de réactions. Le 27 juin, à l’Elysée, Nicolas Sarkozy accuse le programme socialiste de menacer la notation « triple A » de la dette française, alors qu’à la fin de son mandat celle-ci aura déjà vraisemblablement atteint 85% du PIB. C’est gonflé. Et aucun journaliste ne songe à interroger Martine Aubry, pourtant candidate officielle à la primaire socialiste dès le 28 juin…

Israël Palestine : Qu’est ce qu’on dit ?
Le 15 mai, Israël ouvrait le feu sur les Palestiniens qui commémoraient la Naqba (la défaite des Palestiniens en 1948) en franchissant la frontière syro-israélienne, sur le plateau du Golan. Bilan : 12 morts et des centaines de blessés. Pourquoi personne ne s’en est ému en France, ni à l’UMP ni au PS ? Force de l’habitude ou nécessité de chouchouter les Français d’Israël, réserve de voix non négligeable pour les prochaines échéances électorales ? Oui mais voilà, la France aura bientôt quelque chose à dire sur la question. En septembre en effet, les Palestiniens devraient demander un vote à l’Assemblée générale des Nations Unies, pour faire reconnaître leur Etat si les négociations avec Israël n’ont pas abouti. Vote qu’Alain Juppé tient fermement à esquiver. Il a donc reprogrammé la conférence pour la paix, initialement prévue à Paris au mois de juillet, pour le mois de… septembre. Barack Obama, lui, s’est déjà prononcé, le 19 mai, pour un Etat palestinien « sur la base des frontières de 1967 » mais ne veut pas non plus d’un vote. Quant au PS nul ne sait ce qu’il en pense. Du coup, le seul que l’on a vraiment entendu sur la question est Olivier Besancenot, parti en bateau vers Gaza, le 4 juillet, pour tenter de briser le blocus israélien imposé à ce territoire. Et arraisonné deux jours plus tard par… les autorités grecques.

Immigration : qu’est-ce qu’on choisit ?
Le 18 mai, à Cannes, huit femmes de chambre capverdiennes et sans papier occupent leur hôtel, en plein festival. L’UMP est opposée à la régularisation massive des sans papiers, y opposant la thématique de l’immigration choisie. Mais le 24 juin, Claude Guéant, ministre de l’Intérieur, s'est déclaré hostile à l’idée d’immigration de travail au motif que « la France n’a pas vocation à faire venir des chômeurs supplémentaires ».  Qu’en est-il de la position du PS ? Si on peut trouver dans son programme présidentiel, une ébauche de politique de l’immigration (lutte contre les employeurs ayant recours au travail clandestin, loi d’orientation et de programmation sur trois ans, création d’un contrat d’accueil et d’intégration), nulle trace en revanche d’une quelconque proposition concernant les « sans papier ». Restent deux partis aux positions tranchées : le Front national propose de tous les renvoyer et le NPA de tous les régulariser.

La France des canapés versus celle des petits fours
Le 26 mai, Eric Ciotti crée des « brigades antifraudes » pour traquer l’assisté social à Nice –qui est, comme chacun le sait, un haut lieu du grand banditisme rmiste. Le 3 juin, le Figaro Magazine lui emboîte le pas et fait sa une sur les « assistés », ces chômeurs au long cours également surnommés les « canapés » depuis qu’ils n’en bougent plus. A l’autre bout de la chaine alimentaire, les entreprises du CAC 40 se félicitent, en ce mois de juillet, autour des plateaux de petits fours servis dans les assemblées générales d’actionnaires, de leurs excellents résultats (+ 4,66% en 6 mois). Pile au moment où le rapport Carrez nous annonce, le 5 juillet, que les 40 mastodontes de l’économie française, que l’on savait déjà soumis à une pression fiscale quatre fois inférieure à celle des PME, n’auraient payé, entre 2007 et 2009, que 3,4 milliards d’euros par an au titre de l’impôt sur les sociétés. Et encore, l’essentiel de cette somme a été versée par des entreprises dont l’état est encore actionnaire : EDF, Renault, France Télécom, GDF. Les 36 autres (dont Total, BNP-Paribas etc.) n’ont versé que 2,4 milliards –et quatre d’entre elles n’ont pas versé un centime.

Vent de révolte en Europe. Et nous on fait quoi ?
Le 18 mai, les Indignés commencent à occuper la Puerta del Sol. En annonçant qu’il fallait faire ceinture sur les dépenses publiques, et qu’il fallait passer l’âge légal de départ à la retraite de 65 à 67 ans, le gouvernement espagnol a jeté sa jeunesse dans la rue. Bien sûr, le gouvernement français regarde ailleurs car sa politique ne diffère guère de celle de son voisin ibérique. Mais comme le gouvernement espagnol est labellisé socialiste, le PS n’est pas non plus à la fête et ne pipe mot. Le 5 juin, à l’occasion des élections législatives, les socialistes portugais perdent carrément le pouvoir : la droite, a donc promis « d’aller plus loin dans la rigueur ». Le 13 juin, Silvio Berlusconi perd trois référendums d’un coup : nucléaire, privatisation de l’eau et immunité judiciaire du gouvernement sont rejetés à une écrasante majorité. « Un schiaffo », une baffe… Le 21 juin, le Royaume-Uni connaît une grève massive de ses fonctionnaires contre la réforme de leur retraite, l’un de leurs plus importants mouvements sociaux depuis les années 80, précédé là encore par un mouvement de jeunesse. Et depuis le 15 juin, la jeunesse grecque est dans la rue, pour protester contre le plan d’austérité exigé par… le FMI.






Publié dans Société

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