Sarkozy Président fera-t-il oublier Sarkozy candidat ?

Publié le par tutti 49

A Charleville, «Sarkozy Président» fera-t-il oublier «Sarkozy candidat»?

Gérald Andrieu - Marianne | Mercredi 13 Avril 2011 à 05:01


La semaine prochaine «Sarkozy Président» met ses pas dans ceux de «Sarkozy candidat» en revenant à Charleville-Mézières où, en 2006, il avait tenu un discours fondateur de sa campagne élyséenne. Qui, lorsqu’on le réécoute, évoque un épisode de la Quatrième dimension.



Le 18 décembre 2006, grâce à la plume agile d’Henri Guaino rien ne semblait donc impossible au candidat du « pouvoir d’achat », lui qui avait fait le choix de venir s’adresser aux habitants de Champagne-Ardenne, les tenants de cette France qu’il disait « aimer » et « connaître » et qu’il voulait « représenter ». Cette « vraie France » qui « croit au mérite », « à l’effort », « qui est dure à la peine », cette « France dont on ne parle jamais parce qu’elle ne se plaint pas », cette « France qui ne brûle pas les voitures » (sic ). Le 18 décembre 2006, tout est là dans son discours, tous les fondamentaux de sa campagne : « la France qui se lève tôt », le « piège » de « l’assistanat », la volonté affichée d’en finir avec « l'héritage de mai 68 », de se montrer intransigeant avec les « patrons voyous », etc. Ou plutôt tout était là. Car de ces promesses qui ont réussi à séduire 53 % des électeurs en 2007 que reste-t-il en 2011 ?


Plus grand-chose. Car pourquoi avait-il choisit la région Champagne-Ardenne pour un de ses premiers grands meetings ? Il était venu, disait-il à l’époque, s’adresser à « la France des travailleurs pauvres », la « France des salariés de l’industrie qui vivent dans la hantise des délocalisations  », la « France des classes populaires qui a peur de l’exclusion » et celle « des classes moyennes qui a peur du déclassement ». Il promettait à cette France-là une « hausse du pouvoir d’achat » grâce au fameux « travailler plus pour gagner plus » et, dans le même temps, de « faire reculer le chômage de masse » parce que le chômage, expliquait-il, est une « aliénation » et le travail une « émancipation ». Le dispositif d’exonération des heures supplémentaires coûte finalement 4 milliards au budget de l’Etat et s’est substitué à la création de plus de 400 000 emplois (466 000 en 2008, 434 000 en 2009). Le chômage qu’il voulait voir fondre a explosé : le baromètre Marianne établit le nombre de demandeurs d’emploi à la fin de l’année 2010 à 4,65 millions de personnes. Parmi elles, le nombre de chômeurs de plus d’un an a progressé de 20 %. La faute à la crise répondront les partisans de Nicolas Sarkozy. Mais la crise, elle, ne peut être tenue pour responsable des autres promesses en l’air du discours de Charleville-Mézières.


Nicolas Sarkozy était venu dans cette ville de s’adresser à « la France du “non” » au TCE, cette « France qui n’en peut plus de subir, qui n’en peut plus de se sentir pas écoutée, pas entendue, pas respectée. » Et d’expliquer que « le “non” de cette France, c’est celui d’une France qui ne veut pas cesser d’espérer et qui demande aux responsables politiques de lui donner des raisons d’y croire ». Et d’enchaîner alors en expliquant qu’il a lui-même « voté oui au référendum, mais [qu’il veut] et [doit] entendre cette France du “non” parce [qu’il veut] lui donner des raisons de croire en l’avenir et, par dessus tout, d’avoir confiance [en] la parole publique » ! Surprenant laïus quand on se souvient que c’est ce même Sarkozy qui s’est assis sur le « non » de cette France dont il se gargarisait en 2006 en faisant adopter par voie parlementaire le Traité de Lisbonne…


Étonnant aussi de le voir expliquer que « l’immigration non-maîtrisée est une capitulation sociale » quand on sait par exemple que 75% des décisions d’expulsions n’ont pas été exécutées en 2009... Déconcertant, encore, quand on entend Nicolas Sarkozy déclarer, à la manière d’un Lionel Jospin, qu’il veut, s’il est « élu Président de la République, que d’ici à deux ans plus personne ne soit obligé de dormir sur le trottoir et d’y mourir de froid ». Déroutant, enfin, de l’entendre faire un « serment » à « la France » : « Je ne vous trahirai pas, je ne vous mentirai pas, je ne vous abandonnerai pas tout simplement parce que je n’en ai pas le droit compte tenu des responsabilités qui sont les miennes » !


Sarkozy dans sa version 2011 serait bien inspiré de réécouter Sarkozy dans sa version 2006. Car au cœur de ce discours se niche une phrase qui, à en croire les dernières enquêtes d’opinion, pourrait être prémonitoire : « Nous devons changer profondément notre manière de faire de la politique (…) car si nous faisons comme hier nous aurons demain les résultats d’hier, c’est-à-dire le triomphe des extrêmes qui ne sont rien d’autre qu’une impasse pour la République française ».



Publié dans sarko-out

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